Décor et dédoublement fantastiques. Une Sacrée garce et L’Homme et le serpent d’Ambrose Bierce
Le monstre intérieur est l’une des plus terribles menaces dans le récit fantastique. Il arrive que face à l’irruption de l’impossible, les personnages doivent lutter contre l’inconnu le plus létal qui soit: eux-mêmes. Il est question dans cet article des mécanismes de la peur et des étapes enclench...
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Formato: | article |
Lenguaje: | EN ES FR IT PT |
Publicado: |
Universitat Autònoma de Barcelona
2019
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Materias: | |
Acceso en línea: | https://doaj.org/article/1b863fd0b8f246799564e117fba32189 |
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Sumario: | Le monstre intérieur est l’une des plus terribles menaces dans le récit fantastique. Il arrive que face à l’irruption de l’impossible, les personnages doivent lutter contre l’inconnu le plus létal qui soit: eux-mêmes. Il est question dans cet article des mécanismes de la peur et des étapes enclenchées par ce fantastique tourné vers le Moi. Le surnaturel a besoin d’une fissure dans laquelle se faufiler. Chez Bierce, c’est la fragilité psychologique -en particulier la culpabilité à forte résonnance chrétienne ou crainte du sacré- qui rend vulnérable et réceptif au surnaturel et à la terreur. Cet état a pour faculté de transformer un décor neutre en un environnement angoissant et menaçant non sans en exploiter son potentiel sinistre, telle une projection extérieure de la faute intérieure torturant les personnages. S’enclenche alors une lutte interne chez ces derniers, établissant un décor psychologique propice à l’irruption du surnaturel renforcé par des références aux superstitions et peurs ancestrales auxquelles n’échappent pas les héros des deux contes. Les personnages succombent à la terreur sacrée ou numen (primitif) de Rudolf Otto, une variante de la terreur cosmique lovecraftienne. Entre alors en jeu la perturbation des sens. La suggestion enveloppe les personnages, augmente leur angoisse et la sensation d’enfermement sur eux-mêmes. Ils perdent pied et prennent à la fois conscience du danger de mort et de leur impuissance qui les condamne à une mort inéluctable. L’enfermement mental culmine par l’enfermement physique au moyen d’une mise en abyme stylistique. Paralysés, les personnages s’engagent dans une lutte interne qui aboutit à l’irruption du double, le seul recours trouvé par leurs esprits perturbés pour affronter l’impossible. Mais ils deviennent « étrangers vis-à-vis d’eux-mêmes » et par conséquent leurs propres bourreaux respectifs. Ce dédoublement déclenche des doutes angoissants sur leur propre identité, laquelle se révèle sous un aspect méconnu jusqu’alors. L’inconnu, le danger, ce sont eux. Ils se retrouvent enfermés «en» et «par» eux-mêmes. Ils sont donc condamnés, car nul ne peut échapper à soi-même.
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